Le cheval de sport est un vrai athlète. Pour optimiser ses performances, il faut prendre en compte les dépenses particulières de son organisme lors de l’entrainement, afin de les compenser dans la ration.
Nous allons voir ensemble les modifications que l’entrainement provoque vis-à-vis du métabolisme du cheval. Nous envisagerons ensuite différents moyens d’adapter la ration pour couvrir tous les besoins.
Les besoins particuliers du cheval de sport
- Besoins en énergie.
Cela semble évident, réaliser un parcours d’obstacle, une course, une longue randonnée… demande beaucoup plus d’énergie que de brouter au pré toute la journée. Cette différence doit être compensée dans la ration.
L’énergie contenue dans un aliment est généralement comptée en UFC : unité fourragère cheval : c’est l’énergie nette contenue dans 0.99kg d’orge, soit l’énergie réellement utilisable par le cheval dans ce volume d’orge.
Les besoins énergétiques d’un cheval en entrainement sont estimés entre 1,4 et 2 fois plus importants que ceux du même cheval en entretien, selon l’intensité de l’effort fourni. Hors, le cheval n’est pas capable de manger 2 fois plus pour compenser ses pertes : la ration doit être plus énergétique. Il est conseillé de fournir une ration contenant entre 0.5 et 0.75 UFC/kg de matière sèche (kgMS) selon l’intensité de l’activité.
- Besoins azotés.
L’azote est un composant majeur des protéines. Celles-ci sont essentielles pour toutes les réactions chimiques qui s’accomplissent dans les cellules, ainsi que pour la structure de tout l’organisme. Par exemple, le collagène est une protéine se trouvant dans tous les tissus y compris les os. Elle est présente entre les cellules et permet de les maintenir les unes avec les autres.
Au cours d’un effort, la cellule musculaire doit réaliser beaucoup de réactions chimiques pour transformer le glucose en énergie utilisable pour sa contraction. Cela explique qu’elle soit particulièrement riche en protéines, aussi bien structurales que pour les réactions chimiques.
Un athlète sollicitant fortement ses muscles (et de plus les développant fortement), il présente des besoins accrus en azote.
Les besoins en azote sont exprimés habituellement en g MADc : grammes de matière azotée digestible cheval. La MADc correspond à l’azote réellement utilisable pour le cheval dans l’aliment proposé, donc varie selon la digestibilité de celui-ci. Digestibilité fourrages ?
Au repos, la ration optimale contient 65 à 70 MADc/UFC/j.
- Un cheval avec un entrainement régulier aura besoin de 30g MADc/j en plus.
- Un cheval qui commence ou reprend l’entrainement doit se muscler, ce qui augmente ses besoins de 10 à 20%.
La quantité de matière azotée n’est pas le seul critère à prendre en compte, il faut aussi considérer sa composition. Le cheval est incapable de synthétiser certains acides aminés (composants de base des protéines) : ils doivent obligatoirement être fournis par l’alimentation (lysine, thréonine…)
- Besoins en fibres
Les fibres sont indispensables pour le transit intestinal du cheval. Un manque entraine des coliques et des ulcères gastriques.
L’entrainement ne modifie pas les besoins en fibres du cheval… ce qui signifie qu’il ne les diminue pas non plus ! Il faut donc veiller à garder une quantité suffisante de fourrages malgré les besoins accrus en énergie. La ration doit contenir entre 10 et 30% de cellulose brute, idéalement 17%.
- Besoins en minéraux
Les minéraux agissent sur la régulation du métabolisme. Dans des domaines aussi variés que l’ossification (Calcium Ca, phosphore P) que du rythme cardiaque (potassium K) ou du pH sanguin (Sodium Na).
En règle générale, les besoins lors de l’exercice sont légèrement plus élevés qu’à l’entretien. Nous allons nous intéresser aux minéraux qu’il faut prendre en compte lors du calcul de ration (l’apport des autres est toujours suffisant).
- Calcium et phosphore :
- Les besoins en Ca peuvent augmenter jusqu’à atteindre 70mg/kg PV (40mg/kg PV au repos).
- Les besoins en P passent de 29mg/kg PV à 38mg/kg PV lors d’entrainement intense.
- Il faut toujours conserver un rapport Ca/P dans l’alimentation entre 1,5 et 2. Il est possible d’ajouter du Ca en excès pour atteindre ce taux si besoin.
- Sodium : on conseille 3,2g/kg MS à l’effort pour 2,7g/kg MS au repos. Il suffit de laisser à disposition une pierre à sel pour que le cheval se régule.
- Besoins en oligo-éléments (OE)
Les OE permettent le déroulement de nombreuses réactions chimiques au sein de la cellule. Ils ne sont pas « consommés » dans le processus, donc l’entrainement ne modifie pas les besoins malgré l’augmentation du nombre de réactions chimiques.
Il faut veiller à avoir un apport suffisant en cuivre Cu (10mg/kgMS) et Zinc Zn (50mg/kgMS) dans la ration, avec un rapport Zn/Cu=5/1
Le Sélénium Se doit également être apporté à hauteur de 0.1mg/kgMS pour le bon fonctionnement des muscles. Il faut éviter une trop forte supplémentation néanmoins, qui est toxique .
- Besoins en vitamines
Elles ont des rôles variés dans la régulation du métabolisme, dans l’intégrité cellulaire, dans la coagulation… Nous allons nous intéresser à celles pouvant manquer chez le cheval de sport.
- Vitamine A : les apports sont principalement fournis par les fourrages sous forme de carotènes. Il faut veiller à en maintenir suffisamment dans la ration du cheval de sport. Les besoins sont équivalents au repos et à l’exercice. Une supplémentation trop importante en vitamine A peut être délétère pour le cheval.
- Vitamine E : très importante pour l’intégrité cellulaire, les besoins augmentent fortement lors de l’exercice à cause des chocs répétés. On conseille 50UI/kgMS minimum à l’entretien, ce qui peut monter jusqu’à 300UI/kgMS lors d’effort intense.
- Vitamine B12 : elle permet de favoriser la création des globules rouges donc l’apport d’oxygène aux cellules. Elle est indispensable au cheval de sport et souvent carencée dans les rations. Il faut 10µg/kgMS minimum.
Equilibrer la ration d’un cheval de sport
La ration d’un cheval contient en général 2 composantes : du fourrage et un aliment complémentaire (concentrés). Chacun a un rôle indispensable, il faut veiller à apporter des 2 en quantité suffisante. Il ne faut pas non plus négliger l’importance de l’eau de boisson : une hydratation correcte est nécessaire pour apporter l’oxygène aux cellules. Parfois un aliment « complet » remplace les fourrages et les concentrés.
Nous allons nous intéresser aux rations contenant un aliment complémentaire et du fourrage. Nous verrons les différentes matières premières pouvant être utilisées et leur intérêt.
- Les fourrages : Cette famille contient 2 aliments principaux : la paille et le foin.
- La paille : elle est composée de tiges de céréales récoltées tardivement. Ses apports nutritionnels et ses apports en fibre sont presque nuls, car le système digestif du cheval a beaucoup de difficultés à la digérer. Son intérêt consiste à fournir une activité au cheval (bien-être), ainsi que d’éviter les ulcères gastriques en maintenant l’estomac plein (régulation du pH gastrique)
- Le foin : En réalité il y a une infinité de foins de plus ou moins bonne qualités, selon la richesse de la terre sur laquelle il est produit et le moment où il a été récolté. Il faut toujours veiller à choisir un foin vert et souple, qui « sent bon » (pas d’odeur de fermentation par exemple). Le foin va être source :
- d’énergie. Un bon foin fournit 0.52UFC/kgMS, ce qui est suffisant lors d’effort modéré. Un foin de mauvaise qualité fournit environ 0.46UFC/kgMS, ce qui est insuffisant.
- de fibres (cellulose brute). Celles-ci sont essentielles pour le transit intestinal. De plus, on n’en trouve que dans le foin, d’où l’importance de ne pas trop diminuer leur quantité chez les chevaux de sport.
- de matière azotée, en concentration à peu près équivalent à celle des aliments complémentaires. Celle-ci est suffisante.
- de minéraux, oligoéléments et vitamines. Leurs quantités respectives varient énormément d’un fourrage à l’autre, en fonction de la nature du foin (céréales à partir de laquelle il a été produit) et de la qualité de la récolte (la pluie élimine une grande partie des carotènes par exemple). Le foin de Crau est réputé pour son apport exceptionnel en Ca et autres minéraux.
- Les aliments complémentaires sont de 3 types : soit directement composés d’un mélange de céréales, soit composés de céréales modifiées (concassées, fermentées,..), soit créés par l’industrie. Ils sont très riches en énergie, d’où leur intérêt chez le cheval de sport. L’apport en azote et en minéraux dépend en revanche de sa composition et de la transformation éventuelle des matières premières. Généralement les aliments complémentaires sont très pauvres en Ca et carencés en acides aminés essentiels (lysine en particulier)
- Les céréales utilisées sans transformations :
- Avoine : c’est la céréale la plus riche en matière azotée, mais la moins riche en énergie. Elle est souvent utilisée telle quelle ou aplatie.
- Maïs : elle est beaucoup plus riche que l’avoine en énergie, mais fournit très peu de matière azotée. Elle est carencée en tryptophane et en lysine. Pour être digérée correctement, les grains doivent être grossièrement broyés ou concassés.
- L’orge : elle apporte l’énergie et la matière azotée en quantité intermédiaire à l’avoine et au maïs. Elle doit être broyée ou trempée pendant une nuit pour être utilisable.
- Transformations plus poussées des graines :
- Extraction de l’huile des graines oléagineuses et obtention de tourteaux : ils sont moins riches en énergie que les céréales précédentes, mais apportent une grande quantité de matière azotée. Les seuls carences en acides aminés essentiels sont les acides aminés souffrés : méthionone et cystine. Les apports en phosphore et en magnésium sont également importants. Le tourteau de lin est intéressant car il protège le tube digestif et améliore la qualité du pelage. Néanmoins il faut l’utiliser en petite quantité (0.3kg/100kg PV max) car il est toxique à forte dose.
- Cuisson : elle peut être faite artisanalement pour l’obtention de mashes par exemple, ou être une étape de l’élaboration des concentrés industriels. Les mashes sont plus riches en énergie que l’aliment non cuit (amidon mieux digéré), et diminuent les fermentations du gros intestin.
- Les aliments créés par l’industrie. Ils comportent plusieurs transformations et sont généralement présentés sous forme de granulés. Plusieurs gammes existent pour répondre à des besoins spécifiques (gestation, croissance, entrainement plus ou moins intensif…).
Un cheval au repos n’aura pas besoin que d’aliment complémentaire si son fourrage est de bonne qualité. Inversement, la ration des chevaux de course peut être composée de 70% de concentrés.
Certains chevaux, avec des fourrages et un complément alimentaire adapté, reçoivent une ration parfaitement équilibrée. Néanmoins ce n’est pas le cas de tous :
- Un problème courant dans l’alimentation d’un cheval de sport au sein d’une écurie est la disponibilité d’une alimentation complémentaire adaptée. En effet, dans de nombreuses écuries, un seul aliment complémentaire est présent, adapté en général aux chevaux de club. La quantité distribuée varie d’un cheval à l’autre selon le travail fourni, mais un cheval très sollicité ne recevra probablement pas uns complémentation adéquate en minéraux, vitamines, OE… De plus, un gros volume de concentrés sera nécessaire pour couvrir les besoins énergétiques, ce qui se fera au détriment de l’apport en fourrages.
- La présence d’un aliment complémentaire adéquat (gamme « travail intensif » par exemple) sera plus adapté, mais pas forcément suffisant non plus. En effet nous l’avons vu, certains composants essentiels ne sont présents que dans les fourrages. Or, ceux-ci ne sont pas toujours de bonne qualité, donc peuvent engendrer des carences.
Quand le cheval présente des mauvaises performances ou une mauvaise récupération, quand il perd de l’état, ou quand tout simplement nous ne sommes pas certains d’apporter un foin de qualité suffisante, il est intéressant de complémenter les chevaux de sport en vitamines, OE, minéraux et acides aminés essentiels. Il existe pour cela des produits complets sur le marché, sous forme de granulés (greenpex top booster, greenpex MSE entrainement, ravene nutriforme, twydil vigorade…).
Il existe également des produits plus spécialisés, soit destiné à un type d’effort particulier, soit des produits moins complets destinés à favoriser l’oxygénation des cellules et l’effort musculaire (twydil hematinic, audevard redplex +). Enfin, Ravene nutrimax booster contient des plantes diurétiques pour l’élimination des toxines (acide lactique par exemple), favorisant la récupération après l’effort.
Au final, l’alimentation du cheval de sport est bien plus complexe que celle du cheval au pré : pour ce dernier un foin de bonne qualité suffit à couvrir ses besoins. De plus, pour savoir exactement ce que l’on apporte à son cheval ainsi que ses besoins, il faut connaître la composition exacte des aliments fournis et faire de nombreux calculs. Ce n’est pas toujours possible. Heureusement, des compléments alimentaires non dopants existent sur le marché pour limiter les carences et les déséquilibres de l’alimentation.